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Trump a eu «un effet sur l'insécurité des citoyens et sur le vote», croit Blanchet

durée 08h00
23 décembre 2025
La Presse Canadienne, 2025
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Par La Presse Canadienne, 2025

OTTAWA — Le président américain Donald Trump, en brandissant «la fable du 51e État» le matin même où les Canadiens commençaient à se rendre aux urnes pour l'élection fédérale, a eu «un effet sur le vote», croit le chef bloquiste Yves-François Blanchet.

Près de huit mois après cette journée du 28 avril qui s'est soldée par une victoire des libéraux de Mark Carney, M. Blanchet estime qu'il y a désormais «une désillusion importante par rapport au premier ministre».

«Non seulement (ça), mais il n'y a plus personne qui, sérieusement, ramène le sujet du 51e État, qui n'a jamais été un sujet sérieux», a-t-il dit dans une entrevue de fin d'année récemment accordée à La Presse Canadienne.

Le «coup de gueule» ou la «stupidité» exprimée à maintes reprises par le président Trump pour plaider que le Canada gagnerait à être annexé aux États-Unis a joué un «rôle important» au courant de la campagne électorale du printemps 2025, a soutenu M. Blanchet.

«Les mêmes personnes qui disent que le président américain dit et fait des choses qu'elles dénoncent (...) sont celles qui accréditaient la fable du 51e État que le président américain a ressortie le matin même de l'élection, avec un effet sur l'insécurité des citoyens et un effet sur le vote.»

M. Blanchet n'a pas employé l'expression «ingérence étrangère», mais il semble avoir décrit ce type d'intrusion.

À plusieurs reprises au courant de l'entretien, le chef bloquiste a tenu à préciser qu'il ne «fai(t) pas de politique intérieure américaine».

«J'aimerais que le président américain ne fasse pas de politique intérieure canadienne parce qu'il a, peut-être, littéralement donné la dernière élection à Mark Carney», a-t-il poursuivi, assis dans une salle nommée par le Bloc en hommage à l'ancien chef de la formation politique, Gilles Duceppe.

Le chef bloquiste assure qu'il a développé une bonne relation avec l'administration américaine. Il a pu rencontrer certains de ses représentants au cours de ses trois séjours à Washington.

«On a une relation ouverte et assez soutenue avec les autorités américaines. On est capable d'échanger», a-t-il résumé au cours de l'entrevue tenue dans l'édifice de l'Ouest de la colline parlementaire.

Quels gains pour le Bloc en comités?

M. Blanchet était questionné à savoir s'il avait hâte qu'une éventuelle prochaine élection soit moins centrée sur la guerre tarifaire déclenchée par M. Trump.

«Non, ça ne me dérange pas, a-t-il tranché. On dit tout le temps ''ah cette élection-là ne sera pas comme les autres''. Est-ce qu'il y a déjà eu des élections pareilles?»

Néanmoins, il a réitéré que «la peur que les gens avaient de Donald Trump» a été utilisée durant la campagne. Cela «disqualifiait les conservateurs de Pierre Poilievre et donnait un élan aux libéraux de Mark Carney», a-t-il dit.

Or, des électeurs ont finalement choisi de donner leur vote au Bloc quand ils se sont rendu compte que M. Poilievre ne risquait pas de devenir premier ministre, toujours selon l'analyse de M. Blanchet. Le chef bloquiste avait d'ailleurs appelé, durant sa tournée électorale, les Québécois à s'assurer que les libéraux n'obtiennent pas de majorité.

«Il y a beaucoup de Québécois qui sont revenus au Bloc pour dire ''Au moins il y aura quelqu'un pour représenter les intérêts particuliers et différents du Québec dans le Parlement fédéral''.»

Au terme du scrutin, le Bloc a vu son caucus amoindri de 11 députés, mais M. Blanchet se réjouissait d'obtenir plus de pouvoir en comités parlementaires. Le Nouveau Parti démocratique, ayant échoué à faire élire assez de députés pour être une formation reconnue en Chambre, y avait perdu sa place.

Le chef du Bloc estime aujourd'hui que le rôle des bloquistes en comité pourra se consolider en gains au cours des prochains mois, mais que, jusqu'à présent, il n'y a pas eu «beaucoup de cas» puisque le menu législatif en comités a été «très mince».

Il en souligne toutefois un obtenu en comité, soit celui que les libéraux aient acquiescé à une demande de longue date du Bloc: éliminer l'«exception religieuse» du Code criminel.

Cette disposition permet à une personne accusée de fomenter la haine d’être acquittée parce qu’elle a, «de bonne foi, exprimé une opinion sur un sujet religieux ou une opinion fondée sur un texte religieux auquel il croit, ou a tenté d’en établir le bien-fondé par argument».

Un amendement bloquiste au projet de loi C-9 des libéraux a été entériné, mais l'étude parlementaire de la pièce législative doit encore se poursuivre avant que le tout devienne réalité.

Autrement, M. Blanchet a noté que le projet de loi d'implantation des mesures du budget 2025 n'a toujours pas complété son parcours législatif. Les bloquistes tentent bien saisir chaque occasion de faire pression pour que leurs demandes prébudgétaires deviennent réalité, comme celle d'augmenter la pension de vieillesse pour les aînés de 65 à 74 ans.

Il reste à voir quelle réceptivité aura le gouvernement. Avec deux députés conservateurs qui ont rejoint les rangs libéraux, les troupes de M. Carney ne sont plus qu'à un siège d'être majoritaires. Si elles parvenaient à sécuriser une majorité, cette dernière demeurerait tout de même courte.

Émilie Bergeron, La Presse Canadienne