Le retour en classe est placé sous le signe de l'incertitude
Par La Presse Canadienne
Même si un grand nombre de professionnels du milieu de l'éducation sont contents de la fin de la grève qui a perturbé les écoles depuis le 23 novembre, plusieurs continuent d'avoir des craintes sur l'avenir du réseau et des conditions de travail.
D'autres acteurs du milieu scolaire craignent aussi que les grèves aient des conséquences inégales pour les élèves.
Par exemple, la présidente de l’Association montréalaise des directions d’établissement scolaire (AMDES), Kathleen Legault, croit que les grèves ont pu accroître les inégalités.
Seule la Fédération autonome de l'enseignement (FAE) a déclenché une grève illimitée, ce qui a provoqué la fermeture de 800 écoles pendant 22 jours. D'autres établissements, dont les employés sont membres des syndicats faisant partie du front commun, ont été fermés pendant 11 jours. Dans les écoles privées, les élèves n'ont pas été privés de cours.
Certains élèves ont pu bénéficier d'un tutorat privé ou de la présence d'un parent à la maison pour avancer, mais plusieurs n'ont pas eu cette chance. Certains n'ont pas pu manger à leur faim parce qu'ils ne pouvaient pas recevoir des repas dans les écoles, déplore Mme Legault.
«Nous savons qu'il aura des disparités entre les élèves, selon les groupes, mais aussi selon les quartiers, lance-t-elle. Dans les quartiers pauvres où les nouveaux arrivants sont peut-être moins au courant des ressources ou ils reçoivent moins d'aide de leur famille, il y aura des défis à relever.»
Mme Legault dit que le mois de janvier sera placé sous le signe de l'incertitude pour plusieurs enseignants qui attendent toujours de voir les modalités de l'entente de principe conclue entre le gouvernement et les syndicats.
Par exemple, les enseignants membres de la FAE n'ont pas reçu d'indemnité de grève pendant l'arrêt de travail. Ils pourraient trouver dans une position précaire en janvier quand ils recevront leurs factures, mentionne Mme Legault.
La présidente de l'AMDES craint aussi que la grève ait un effet déblatère sur le moral des enseignants. Au cours du conflit, plusieurs enseignants ont pu se sentir mal-aimés et envisagent de quitter la profession. «Les enseignants n'oublieront pas, commente Mme Legault. Ils se sentent déconsidérés, ils ne se sentent pas importants. On sait que plusieurs ne savent pas s'ils vont demeurer dans le réseau de l'éducation.»
Le ministre de l'Éducation, Bernard Drainville, a annoncé vendredi que tous les examens ministériels prévus en décembre ou au début de janvier étaient rapportés à la fin du mois de janvier et au début de février afin de donner aux élèves du primaire et du secondaire plus de temps pour se préparer. Le gouvernement doit préciser mardi son plan pour le rattrapage scolaire.
Plusieurs conseils scolaires ont décidé de rapporter le retour en classe à mardi pour donner plus de temps aux enseignants à préparer les cours.
Marion Miller, une enseignante en art dans une école secondaire de l'île de Montréal, croit qu'il est heureux que les élèves et les professeurs aient appris à être flexibles pendant la pandémie de COVID-19. Selon elle, le retour en classe sera difficile pour certains, notamment ceux qui ont des problèmes d'apprentissage.
«Les parents et les enseignants savent que les besoins des élèves les plus vulnérables, même lorsque ceux-ci sont en classe, ne sont pas comblés à cause du manque de ressources dans les écoles», ajoute-t-elle.
Le président de l'Ordre des psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec, Félix-David Soucis, croit au contraire que le retour en classe se fera assez facilement dans la plupart des cas. Il est toutefois possible que certains élèves puissent éprouver des ennuis au cours de la transition, notamment ceux souffrant de difficultés d'apprentissage, d'autisme, de dépression ou d'anxiété.
M. Soucis juge qu'il est important pour les enseignants et les parents de garder ouverts les canaux de communication avec les enfants et les adolescents.
Mme Miller dit qu'elle compte observer ses élèves lors du retour en classe. Elle prévoit certaines activités amusantes «pour briser la glace».
«Nous allons être très heureux de nous retrouver. C'est presque comme un nouveau départ, comme si nous revenions des vacances estivales.»
Morgan Lowrie, La Presse Canadienne
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